Droit
Rapport Ricol sur les procédures collectives : vers une modernisation des pratiques
René Ricol a remis au Premier ministre un rapport qui préconise notamment le maintien du super-privilège des créances salariales, en cas de liquidation judiciaire. Matignon lui avait demandé de se pencher sur le sujet pour apaiser les tensions entre l’AGS et les administrateurs judiciaires.

Le
8 mars dernier, le Premier ministre, Jean Castex, avait confié à
l’ancien Médiateur du crédit et commissaire général à
l’Investissement, René Ricol, une mission visant à assurer une "médiation" entre l’Assurance garantie des salaires
(AGS) et les administrateurs et mandataires judiciaires et à
proposer des pistes de solution pour améliorer l’efficacité des
procédures collectives. Une commande destinée à apaiser les
tensions et la dégradation des relations entre les administrateurs
judiciaires et l'AGS survenues à l'occasion de la consultation
organisée par le gouvernement sur le projet d’ordonnance pour la
transposition de la directive "Restructuration et insolvabilité".
Menace
sur le super-privilège des salariés
En
cas de liquidation judiciaire, le projet d’ordonnance du ministère
de la Justice envisageait, notamment, de faire passer le
remboursement des créances d’avances de salaires de l’AGS après
celui d’autres créances, et notamment les frais engagés par les
administrateurs judiciaires
durant la procédure. C’est cette disposition, qui aboutirait à
rétrograder le super-privilège dont bénéficie les salariés, qui
a provoqué une levée de boucliers des organisations syndicales et
patronales et de l’AGS (qui prend en charge les rémunérations des
salariés des entreprises en difficulté, avant d'être en partie
remboursée à l’issue de la procédure collective). Cette dernière
a également pointé du doigt une explosion des frais de procédures
qui, selon elle, met en danger l'équilibre du régime.
Un lot de mesures à court terme
Dans
son rapport, remis le 21 avril dernier, René Ricol émet un certain
nombre de propositions à plus ou moins long terme. Il appelle tout
d’abord à clarifier les règles concernant l’ordre de priorité
des créanciers dans les procédures collectives et recommande de
« reprendre l’état actuel du droit », en cas de
liquidation judiciaire, à savoir « des créances salariales
superprivilégiées », avant le paiement des « frais
de justice postérieurs au jugement d’ouverture » –
c’est-à-dire le maintien du remboursement prioritaire de l’AGS.
De
plus, après avoir constaté un « manque de transparence »
sur les frais de justice et de procédure, ainsi que « parfois,
leur caractère excessif », le rapport appelle à « une
transparence totale des coûts » : prévisions en
amont, justification des dépassements, bilan détaillé en fin de
procédure. Il préconise aussi une « mise en
concurrence » des différents intervenants à ces
procédures, et notamment le recours à un plus grand nombre
d'administrateurs ou mandataires judiciaires par les tribunaux de
commerce.
Une réforme plus globale dans les 18 mois
Enfin,
René Ricol suggère de mener une réflexion plus globale pour
aboutir, dans les 18 mois, à « une clarification des textes
et une modernisation encadrée des pratiques » des
professionnels intervenant dans les procédures collectives.
Dès
le lendemain de la remise du rapport, l’AGS a
dit partager « les principales conclusions de
la mission confiée à René Ricol » et a salué en
particulier « les préconisations visant, respectivement, à
un maintien du remboursement prioritaire de l’AGS, à une
transparence totale des procédures de fixation des frais de justice
et à un renforcement des mesures de contrôle ».
Mettre en œuvre « les bonnes pratiques de place » proposées par le rapport
Dans un communiqué publié le jour de la remise du rapport, le gouvernement a indiqué qu’il allait finaliser l’avant-projet d’ordonnance en vue de sa promulgation d’ici l’été « sur la base des recommandations du rapport » et engager des travaux « sur les pistes de réforme proposées à plus moyen terme ». Et alors que l’on craint une flambée du nombre des entreprises en difficulté du fait de la crise, il appelle tous les acteurs des procédures collectives « à mettre en œuvre sans délai les bonnes pratiques de place proposées par René Ricol ».