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Déchets : une filière régionale en pleine mutation

Depuis quelques années, une transition vers une nouvelle économie est enclenchée dans les Hauts-de-France, plus durable et connectée, impulsée par le numérique et un nouveau modèle : le linéaire devient circulaire. Baptisée Rev 3, cette révolution implique des changements... La filière déchet en est une partie intégrante.

Les déchets sont revalorisés chez Baudelet Environnement.(c)Baudelet Environnement
Les déchets sont revalorisés chez Baudelet Environnement.(c)Baudelet Environnement

Une plate-forme moteur pour la production d’électricité chez Baudelet Environnement. (C)Baudelet Environnement

Le réchauffement climatique devient une réalité et la société d’aujourd’hui est confrontée à de nouveaux défis sociétaux… L’environnement est au cœur de cette mutation. La gestion des déchets dépasse les frontières de la région : elle fait partie d’une des problématiques mondiales. Dans les Hauts-de-France, la filière déchets mute. Depuis 2016 – date à laquelle les régions sont devenues responsables de la planification des déchets sur le territoire régional – des objectifs ambitieux sont affichés, impulsés et intégrés dans la démarche de la troisième révolution industrielle (Rev3). Des objectifs qui s’échelonnent jusqu’en 2031… Il reste dix ans pour que politiques, collectivités, entreprises et citoyens s’accordent et s’entendent sur le monde de demain.

Une stratégie

Toute cette dynamique se base sur une stratégie régionale élaborée. Cette dernière s’appuie sur l’engagement des habitants et des acteurs économiques du territoire dans une démarche de prévention des déchets et d’économie circulaire (le grand changement du modèle économique) à grande échelle. Des leviers principaux ont été établis dans un plan, le Plan régional de prévention et de gestion des déchets (PRPGD), dont le but est de mener à bien cette ambition collective : lutter contre le gaspillage, développer le compostage des biodéchets, développer le réemploi, la réparation pour les objets encombrants et mobilier, sensibiliser les citoyens à la prévention des déchets et déployer la tarification incitative pour soutenir financièrement les efforts des ménages dans la diminution de leurs déchets. Au total, trois axes sont fléchés dans ce plan : la prévention, la santé/ environnement, emploi/ formation. Autant de paramètres qui englobent tous les pans de la société… pour une économie 100% circulaire. Ambitieuse, la Région s’est donnée également comme objectif de devenir l’un des leaders européens en matière de biogaz, permettant ainsi de valoriser autrement les déchets.

Économie circulaire

Néanmoins, la région des Hauts-de-France est aussi en retard sur cette valorisation des déchets, notamment les déchets ménagers. Elle se caractérise par une production de Déchets ménagers et assimilés (DMA) supérieure à la moyenne nationale – les Hauts-de-France pèsent 9,5% du volume national des déchets, pour 9% de la population et 7% du PIB. L’économie circulaire est donc pour la région, selon le Conseil économique, social, et environnemental régional (CESER), « un pilier transversal » pour diminuer cette production et ce conseil préconise « l’élaboration d’une stratégie régionale d’économie circulaire ». Cette transformation du modèle de la filière des déchets est engagée aussi dans la dynamique de la Rev3 où l’économie circulaire représente l’un des centres de ce nouveau modèle économique, plus durable… parce que le meilleur déchet est celui que l’on ne produit pas.

C’est pourquoi l’un des nouveaux défis de la filière est de changer son modèle économique. Alors qu’il a toujours été linaire, il devient circulaire. Cette économie circulaire représente la clé pour engendrer une nouvelle dynamique : la fin de vie du produit devient essentielle et sa réutilisation, une priorité. « Chez nous, cette fin de vie du produit est prise en compte et l’économie circulaire est cette nouvelle mentalité dans la filière régionale, témoigne Caroline Poissonier, co-dirigeante de l’entreprise nordiste Baudelet Environnement, spécialiste du traitement et de la valorisation des déchets. Pour moi, l’avenir des déchets passe par la valorisation des déchets en énergie. Nous sommes dans la recherche permanente de la circularité. » Cette entreprise du Nord, implantée dans le paysage de la valorisation des déchets depuis 55 ans, est un exemple de la mutation de la filière. En 2025, l’entreprise ambitionne d’être le leader du Nord de la France dans la valorisation des déchets, avec notamment la création d’un bureau d’études consacré à cette future revalorisation. « Notre projet Baudelet Synergie Plus va dans ce sens avec la création de nouvelles lignes et de nouveaux débouchés. Nous visons les déchets du BTP, les biodéchets et le plastique, explique Caroline Poissonnier. Nous sommes un intermédiaire, c’est notre devoir de changer et de réfléchir sur cette valorisation. »

Du côté des collectivités, les actions sont également en cours. C’est le cas pour l’Agglomération du Saint-Quentinois qui a lancé une filière éco-responsable au sein d’une de ces déchetteries à Saint-Quentin. La collectivité a signé une convention avec Avenir et développement formation de l’Aisne (ADF02) pour mettre en place le projet Recycl’Jouets. « C’est une suite logique des collectes éco-responsables et solidaires ponctuelles menées depuis 2016 sur le territoire, ce partenariat permet à nos usagers de déposer des jouets toute l’année, uniquement à la déchetterie Ouest », explique-t-on à l’Agglomération. Concrètement, les jouets tels que les figurines, poupées, peluches, instruments de musique, jeux de construction ou encore de société sont collectés, nettoyés et réparés pour être revendus à bas prix sur les marchés locaux. Puis la recette des ventes permet de financer la formation d’adultes en réinsertion. La collectivité explique que cette action est « une action qui favorise la réduction des déchets en offrant une seconde vie aux jouets, tout en soutenant l’insertion professionnelle par l’activité économique. À travers cette nouvelle filière, l’Agglo du Saint-Quentinois contribue ainsi activement à l’économie sociale et solidaire ainsi qu’à l’économie circulaire, deux des leviers de la troisième révolution industrielle. »

Cet exemple d’économie circulaire engendre aussi un cercle vertueux sociétal : une initiative environnementale amène une action sociale… la Rev3 est enclenchée.


Les objectifs de la Région en chiffres

D’ici 2031, le Plan régional de prévention et de gestion des déchets (PRPGD) recense des objectifs très concrets :

  • Développer les collectes séparées à la source pour assurer une valorisation maximale, et passer à un taux de recyclage des déchets ménagers de 40% en 2031, soit 220 kgs/ habitant/ an contre 185 kgs/ habitant/ an en 2015.
  • Améliorer la collecte des biodéchets et des emballages ménagers en passant de 36 kgs/ habitant/ an en 2020 à 38 kgs/ habitant/ an en 2031.
  • Réduire la production des déchets ménagers de 10% dès 2020, soit une diminution de 74 kgs/ habitant par rapport à 2010 et une diminution de 83 kgs/ habitant en 2031.
  • Développer les collectes séparées à la source pour assurer une valorisation maximale, et passer à un taux de recyclage des déchets ménagers de 40% en 2031, soit 220 kgs/ habitant/ an contre 185 kgs/ habitant/ an en 2015.
  • Améliorer la collecte des biodéchets et des emballages ménagers en passant de 36 kgs/ habitant/ an en 2020 à 38 kgs/ habitant/ an en 2031.


Lutte contre le plastique : zoom sur la loi AGEC

Cette loi est relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire – adoptée le 21 janvier 2020 et s’inscrivant dans la mise en œuvre de la charte de l’environnement de 2004 – et doit accélérer le changement des modèles de production et de consommation afin de réduire les déchets et préserver les ressources naturelles, la biodiversité et le climat. L’un des grands enjeux est la fin des emballes plastiques à usage unique à compter de 2040 et de tendre vers 100% de plastique recyclé à partir de 2025. Pour ce faire, des objectifs de réduction, de réutilisation, de réemploi et de recyclage de ces emballages sont fixés par décret pour la période 2021-2025, puis tous les cinq ans jusqu’en 2040. Du côté de la valorisation, la loi interdit aussi par principe la destruction (incinération et mise en décharge) des invendus non alimentaires neufs, comme les vêtements, les chaussures, les produits de beauté, les livres ou l’électroménager. Les entreprises doivent, sauf exceptions, donner ou recycler leurs produits au plus tard fin 2021 ou fin 2023 selon les secteurs. De même, la vente en vrac est encouragée, sur amendements des parlementaires. Au 1er janvier 2021, il devient possible d’apporter ses propres contenants dans les commerces.