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Les circuits courts au service de la restauration collective

Initié par la Chambre d’agriculture de la Somme avec le soutien du Conseil départemental, le projet Somme Produits Locaux a permis de développer l’approvisionnement en circuits courts d’une quarantaine de collèges mais aussi de lycées, la cuisine centrale d’Amiens ou encore des établissements médicaux-sociaux.

Somme produits locaux fournit la restauration collective.
Somme produits locaux fournit la restauration collective.

Il y a une décennie, alors que les circuits courts étaient encore peu valorisés, quelques chefs cuisiniers officiant dans des collèges de la Somme ont émis le souhait de revoir leur circuit habituel d’approvisionnement et d’y intégrer des produits locaux. Une envie également partagée par les agriculteurs du département. Rapidement, la Chambre d’agriculture de la Somme, soutenue par le Conseil départemental, imagine Somme Produits Locaux, une SAS qui rassemble aujourd’hui une soixantaine de producteurs. Ainsi fédérés, ils ont la possibilité de répondre aux marchés publics donnant accès à la restauration collective.

Pas d’intermédiaire

Moyennant un droit d’entrée, chaque producteur du territoire peut adhérer à Somme Produits Locaux. En prenant part à ce projet, il s’engage néanmoins à respecter les valeurs et le règlement de la structure. Tous les membres sont par exemple agriculteurs et non des intermédiaires pratiquant l’achat/ revente. Un fonctionnement transparent qui assure entre autre la qualité et la traçabilité des produits.

Ce regroupement collectif donne aussi la possibilité de répondre aux appels d’offres lancés par la restauration collective publique, notamment celle des collèges, acheteurs historiques de Somme Produits Locaux. Chacun des 42 établissements bénéficie de son propre catalogue numérique répertoriant les produits disponibles à proximité.

Les rencontres Somme Produits Locaux.(c)CD80

Si la Chambre d’agriculture a su accompagner la structuration des circuits courts, le Département de la Somme a, lui, investi dans des fours à basse température, un outil qui offre de multiples possibilités en matière de cuisson. Un fonctionnement efficace qui a ouvert de nouveaux débouchés aux agriculteurs tout en permettant aux établissements de travailler sur le gaspillage alimentaire en misant sur des plats de qualité. Pour aller plus loin dans cette coopération inédite, la Chambre d’agriculture et le Département organisent également régulièrement des rencontres professionnelles directement au sein des exploitations des adhérents. Là, les différents acteurs peuvent échanger, dialoguer et prendre conscience des attentes ou problématiques de chacun.

Cette collaboration forte a aussi permis de mettre en place très rapidement des drives fermiers pendant la crise sanitaire. Une vente directe aux particuliers qui est venue apporter une solution concrète aux producteurs privés de leurs marchés habituels.

Développement régional

En 2018, les plates-formes numériques, dont celle de Somme Produits Locaux, ont fusionné pour donner naissance à approlocal.fr, un site régional qui permet de centraliser l’offre à destination des acteurs publics de la restauration hors domicile. Cette même année, 260 acheteurs se sont fournis auprès de 260 producteurs pour un chiffre d’affaires d’1,45 million d’euros. En 2019, ce montant a connu une croissance exceptionnelle de 17%, faisant grimper les résultats dans la Somme à 900 000 euros. Si aujourd’hui les collèges du département consomment en moyenne 12% de produits locaux – un chiffre qui peut monter jusqu’à 30% dans le meilleur des cas – la tendance devrait encore s’accroître à court terme.

Outre l’engouement pour ce type de système, la loi EGalim prévoit, à partir de 2022, que les repas servis au sein des restaurants collectifs soient constitués à 50% de produits durables et de qualité. Des critères auxquels peuvent répondre les denrées locales. Par ailleurs, le Conseil régional des Hauts-de-France s’est fixé pour objectif d’approvisionner à 70% les lycées en produits locaux à l’horizon 2021. Une bonne nouvelle pour les producteurs mais aussi pour l’économie et l’emploi puisque l’on estime que les circuits courts créent deux fois plus d’emplois sur le territoire que les réseaux classiques.

 

Les drives fermiers pendant la crise sanitaire.(c)CD80


Une animatrice dédiée

En plus de l’outil numérique, le réseau Somme Produits Locaux bénéficie d’une animatrice dédiée. Un relais précieux qui vient notamment faciliter et fluidifier les relations entre producteurs et acheteurs. « En plus de la plate-forme, il est important d’avoir un contact humain, c’est quelque chose de rassurant pour tous les acteurs. Je suis là pour répondre aux questions, faire remonter d’éventuels problèmes de qualité, répartir les commandes ou encore trouver d’autres débouchés », résume Céline Rivet qui occupe ce poste depuis deux ans. Avec bienveillance et pédagogie, elle accompagne les producteurs partenaires dans leur découverte des marchés publics, lève les éventuels freins et les encourage dans leur démarche de diversification. « C’est le producteur qui a toujours la main, j’interviens en soutien, je fais remonter les besoins et je veille à la cohérence d’ensemble, mais c’est lui qui est maître de son prix, de ses volumes et de ses livraisons », poursuit-elle. À la fois facilitatrice et organisatrice, Céline Rivet effectue également un travail de veille qui permet d’identifier de nouveaux marchés porteurs pour les adhérents. « Nous travaillons actuellement sur une offre de paniers de produits locaux à destination des comités d’entreprises à l’occasion des fêtes de fin d’année », explique-t-elle, fière de l’engouement suscité par cette initiative et ses conséquences positives sur le tissu agricole local. « Somme Produits Locaux a permis d’offrir des alternatives et de préserver de petites structures. C’est une vraie richesse au sein d’un territoire », souligne-t-elle.


Le bien-être animal

« Lorsque deux de mes enfants ont rejoint l’exploitation familiale en 2010 nous avons cherché avec mon mari Éric, qui était céréalier, à nous diversifier », raconte Bénédicte de Caffarelli. Le couple, installé à Chaussoy-Epagny, se tourne vers l’élevage de poules pondeuses, une pratique à la fois « simple et très technique ». Après avoir visité de nombreuses installations, les producteurs font construire une volière, un équipement plus haut qu’un poulailler classique qui respecte le comportement naturel des animaux.

Bénédicte et Éric de Caffarelli.(c)EARL de Caffarelli

Aujourd’hui, cet outil accueille sur un parcours herbagé de 13 hectares quelques 30 000 poules pondeuses. « Les fientes sont évacuées tous les deux jours ce qui permet d’avoir une atmosphère très saine. Les poules volent d’un perchoir à l’autre, il ne faut pas oublier que c’est un volatile qui a besoin de voler et de s’ébattre », poursuit Bénédicte de Caffarelli qui était la première dans le nord de la France à opter pour ce système. Chaque matin, après avoir fait le tour des installations et ramassé les œufs au sol, les producteurs mettent en route les tapis transversaux qui réceptionnent les œufs pondus dans le pondoir et les acheminent vers le centre de conditionnement. Là, ils sont triés, nettoyés et mis automatiquement en alvéole. Si la majorité des 9,6 millions d’œufs annuels partent chez un repreneur dans la Marne, 10% de la production est dédiée à la vente directe. « Pour cette activité, nous mirons les œufs, nous les calibrons et tamponnons. Ils sont ensuite conditionnés en caisses ou en boîtes de six ou de douze », détaille Bénédicte de Caffarelli qui vend sa production au sein des boucheries/ charcuteries, des boulangeries, des épiceries mais aussi des collèges du département. « En 2012 j’ai lu un article dans l’Action agricole picarde qui parlait de Somme Produits Locaux. L’initiative m’a beaucoup intéressée, je me suis donc rapprochée de la Chambre », explique-t-elle avant d’ajouter : « C’est un outil extraordinaire qui regroupe tous les acteurs de la restauration collective, c’est un gain de temps formidable pour nous. Cela m’a aussi permis de rencontrer d’autres agriculteurs, dont mes associés chez Esprit Fermier. C’est une ouverture sur l’extérieur aussi bien d’un point de vue économique qu’humain ». Bénédicte de Caffarelli souhaite aujourd’hui développer cette vente directe et accroître sa part de collèges comme clients. Pour cela, elle cherche une solution logistique pour assurer la livraison de ses œufs.

Bénédicte et Éric de Caffarelli dans le centre de conditionnement.(c)EARL de Caffarelli