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Les petites villes, de bonnes gestionnaires

Les petites villes gèrent leur budget de manière raisonnable, d'après une étude de la Banque Postale. Les nouveaux élus n'en trouveront pas moins une situation complexe.

Betty Marcerou, directrice adjointe de la direction des Entreprises et du développement des territoires et  Christophe Bouillon, président de l'APVF. 
© Anne Daubrée
Betty Marcerou, directrice adjointe de la direction des Entreprises et du développement des territoires et  Christophe Bouillon, président de l'APVF. © Anne Daubrée

« Bon gestionnaires et très prudents » : ce sont les maires des petites villes… Le 3 décembre, à Paris, Christophe Bouillon, député de Seine-Maritime et président de l’APVF, Association des petites villes de France, qui regroupe 1 200 adhérents, commentait ainsi les résultats de la 5e édition de l’étude de la Banque Postale, Regard financier sur les petites villes. L’enjeu concerne plus de 26 millions de Français (38% de la population, en croissance) qui résident dans l’une de ces 4 059 petites villes (2500 à 25 000 habitants).

Côté dépenses, ces collectivités ont une « gestion vertueuse », commente Luc-Alain Vervisch, directeur des études de la Banque Postale. En 2018, les petites villes ont dépensé au total 38,9 milliards d’euros, soit 37% du budget de l’ensemble des communes. Bien qu’elles ne rentrent pas dans le champ de la contractualisation avec l’État pour la maîtrise de leurs dépenses de fonctionnement, les petites villes se sont d’elles-mêmes modérées. En moyenne, elles dépensent 1 494 euros par habitant, une dépense qui croît suivant la taille de la commune. Dans le budget, les dépenses de fonctionnement représentent 26,4 milliards d’euros, (dont plus de la moitié de frais de personnel), en baisse de 0,8% par rapport à 2017, après une stabilité de cinq années. « Cette tendance s’inscrit dans le cadre de la maîtrise des dépenses, et il correspond aussi à une prise en charge par les structures intercommunales », commente Luc-Alain Vervisch. Une tendance qui est confirmée par « un poids en réduction progressive des budgets annexes », ajoute l’expert.

Les dépenses d’investissement, elles, s’élèvent – hors remboursement de la dette – à 8,4 milliards d’euros, en 2018, soit 321 euros par habitant. Pour la troisième année, elles ont progressé, de 8,8%, en cette période d’approche de fin de mandat. Toutefois, cette reprise ne rattrape pas le retard accumulé entre 2013 et 2015. Il y a là un « point de vigilance », met en garde Christophe Bouillon : « Il faut investir dans les équipements, car parfois, si on ne le fait pas dans la durée, cela risque de coûter plus cher ». Reste à savoir si la nature de leurs ressources leur en laisse l’opportunité.

Les nouveaux maires confrontés à un casse-tête

Côté ressources, en effet, concernant les dotations de l’État, celles-ci ont cessé de baisser en 2018, après la période de gel, puis de baisse de la période 2012-2017. Mais cette réalité recouvre des « réalités hétérogènes », précise Luc-Alain Vervisch. Par exemple, en 2019, la dotation forfaitaire (DF), diminue pour 71% des petites communes, augmente pour 25% d’entre elles, et reste stable pour les 5% restants. À l’inverse, les dotations de solidarité urbaine (DSU) et de solidarité rurale (DSR), augmentent toutes deux, pour environ 85% des communes. Aujourd’hui, les collectivités sont dans un état de « relative dépendance », lié au « rôle croissant des dotations versées par l’État, qui ont pris une logique de ciblage », alerte Luc-Alain Vervisch. Même logique, concernant les éventuelles subventions départementales et régionales, que ces dernières considèrent comme « un outil de leur politique » : il ne reste plus au maire qu’à espérer que les unes et les autres correspondent aux priorités de sa propre commune…

En dépit de cette tendance, les petites villes ont peu usé du levier fiscal : en 2018, plus des trois quarts d’entre elles n’ont pas modifié leurs taux de fiscalité sur les ménages. Le restant se répartit équitablement entre celles qui ont augmenté la TFPB, taxe foncière sur les propriétés bâties, et celles qui l’ont baissée. Quel que soit le type d’intercommunalité auxquelles elles se rattachent, les recettes fiscales les plus importantes pour les communes, soit plus de la moitié, sont la taxe d’habitation, la TFPB et la taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFPNB). Au total, fruit de la gestion vertueuse des petites villes, en 2018, l’épargne nette s’élève à 4,7 milliards d’euros, pour représenter 184 euros par habitant, en hausse de 5,2% par rapport à l’année précédente.

Si le panorama dressée par l’étude, montre une situation financière saine, les nouveaux élus n’en feront pas moins face à des difficultés non négligeables. En cause : la réforme de la taxe d’habitation, qui représente plus du quart des ressources des communes. L’ APVF, qui continue d’en déplorer le principe, s’inquiète de la réalité de la compensation par l’État et de la difficulté à en mesurer les effets sur la trajectoire des finances locales. « Il y a une difficulté technique, pour un maire, pour être en capacité de savoir quelle va être sa dotation », explique Luc-Alain Vervisch, qui qualifie le système de « relativement illisible » et « imprévisible ». Un enjeu d’autant plus important que les nouveaux maires qui seront élus en mars 2020, auront jusqu’au 30 avril pour présenter un budget, dans les nombreuses communes qui ne l’ont pas fait.

Betty Marcerou, directrice adjointe de la direction des Entreprises et du développement des territoires et  Christophe Bouillon, président de l’APVF.
© Anne Daubrée