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Les inquiétudes des entreprises du transports publics

Même en-dehors des périodes de grève, les opérateurs des transports sont confrontés à des défis importants, à commencer par celui de l’équilibre économique. Les réseaux se sont étendus géographiquement, impliquant d’importants investissements.

Si l’on se fie aux utilisateurs, emprunter les transports publics ne présenterait pratiquement que des avantages. © Adobe
Si l’on se fie aux utilisateurs, emprunter les transports publics ne présenterait pratiquement que des avantages. © Adobe

« Recommanderiez-vous à vos proches d’utiliser les transports publics ? » À 92%, les utilisateurs des bus, tramways et métros répondent oui. Ce sondage a évidemment été réalisé avant le mouvement de grève qui complique depuis le début du mois de décembre les trajets du quotidien, notamment en Île-de-France. L’Union des transports publics (UTP), qui rassemble 230 entreprises du secteur, commanditaire de cette enquête, espère que l’enthousiasme des usagers reviendra rapidement, une fois la grève terminée.

Si l’on se fie aux utilisateurs, emprunter les transports publics ne présenterait pratiquement que des avantages. 67% d’entre eux les recommanderaient parce qu’ils sont plus pratiques, une proportion toutefois en baisse par rapport aux années précédentes. 55% estiment que les transports sont meilleurs pour l’environnement, un jugement en forte hausse ces dernières années. 44% assurent que c’est une solution plus économique que la voiture individuelle et 36% que c’est plus rapide. Seuls 20% des usagers admettent que s’ils montent dans le bus ou le tramway, c’est qu’ils « ne peuvent pas faire autrement ».

Alors que la loi d’orientation des mobilités (LOM), votée définitivement en novembre, doit entrer en vigueur prochainement, les usagers ne s’expriment pas seulement dans un sondage. Ils votent aussi « avec leurs pieds », en utilisant davantage les services. « Le dynamisme est très soutenu, notamment en province », observe Thierry Mallet, PDG de l’opérateur Transdev et président de l’UTP. Entre 2017 et 2018, la fréquentation des réseaux urbains, hors ÎIe-de-France, a progressé de 3%, celle de la RATP de 1,1% et celle des trains régionaux de 0,4%. Seuls les trains qui desservent la région parisienne ont attiré moins de monde en 2018 qu’en 2017, et pour cause, la SNCF ayant connu une grève saucissonnée, deux jours sur cinq, entre avril et juin 2018. Les chiffres les plus récents, à Lyon ou à Rennes, confirment cet engouement. En Île-de-France, l’enquête globale sur les transports, réalisée en 2018 à la demande de la région, montre une augmentation de 10% par rapport à l’édition précédente, en 2010.

Le secteur est pourtant confronté à plusieurs défis. L’UTP cherche à démontrer que ses adhérents répondent aux préoccupations environnementales qui émergent dans la société. « On nous surveille beaucoup, les normes que nous devons respecter sont bien plus contraignantes que celles qui s’appliquent aux voitures individuelles », remarque Marc Delayer, directeur des transports publics de Cholet (Maine-et-Loire) et vice-président de l’UTP. Or, les émissions néfastes pour le climat, présentées en grammes de CO2 par passager, sont inférieures pour tous les moyens de transport public, les métros et les tramways, bien sûr, mais aussi les bus dans les villes moyennes, par rapport aux voitures particulières et aux deux-roues motorisés. L’UTP s’appuie sur les chiffres de l’Ademe, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie.

Un défi géographique

Mais les défis sont surtout économiques, et géographiques. Le périmètre des transports urbains ne cesse de s’élargir. En 2002, 23,7 millions de personnes étaient, en France, desservies par un réseau. En 2012, elles étaient 28,2 millions. En 2017, avec l’extension des structures intercommunales, consécutives aux lois territoriales votées durant le quinquennat Hollande, le chiffre a bondi à 35,3 millions, plus de la moitié de la population française.

Dans le même temps, le territoire couvert a plus que triplé. Concrètement, les réseaux desservent désormais des bourgades et villages récemment entrés dans l’intercommunalité, où ne passent chaque jour que quelques bus, qui transportent peu de passagers. Ces extensions, coûteuses, « peuvent fragiliser l’équilibre économique du transport urbain et conduire à délivrer un service de moindre qualité », avertit l’UTP. Sans surprise, les entreprises en profitent pour rappeler que la gratuité des transports publics offerte aux usagers, promise par de nombreux candidats aux municipales, risquerait d’affaiblir encore la capacité des opérateurs.

Pour venir au secours des réseaux urbains, la toute nouvelle LOM donne aux régions la possibilité de créer des services de transport dans des zones jusque là non desservies, mais cela impliquera «une cohérence des stratégies de mobilité aux différentes échelons territoriaux», prévient l’organisation professionnelle.

L’UTP s’est également interrogée sur l’usage, par les voyageurs, des applications pour smartphone. Seuls 20% d’entre eux les utilisent régulièrement, et 56% ne s’en servent jamais. « L’information des voyageurs ne se résume pas à des applis, mais passe aussi par de l’affichage sur les quais, des écrans dans les véhicules et des annonces sonores », commente Marie-Claude Dupuis, directrice de la stratégie de la RATP et vice-présidente de l’UTP. Des services indispensables, mais souvent déficients, en particulier en cas de perturbations massives comme celles que connaissent les transports ces jours-ci.