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Le marché du "sans gluten" se développe en Picardie

Avec une croissance de 28% et un marché estimé à 78 millions d’euros en France, le "sans gluten" connaît depuis quelques années un véritable boom. Première productrice de produits de ce type, la Picardie profite pleinement de ce secteur en plein essor.

ProtAlsafe regroupe cinq partenaires issus de l'industrie et de la recherche.
ProtAlsafe regroupe cinq partenaires issus de l'industrie et de la recherche.
Le groupe ABCD nutrition compte 150 références de produits.

Le groupe ABCD nutrition compte 150 références de produits.

Avec 60 000 personnes diagnostiquées en France comme intolérantes au gluten (matière présente dans le blé, l’orge, le seigle ou l’avoine), soit 1% de la population, le marché des produits alimentaires sans gluten est resté pendant longtemps une niche destinée à des enseignes spécifiques. Et pourtant, depuis environ cinq ans les produits sans gluten ont fait leur arrivée dans les grandes surfaces, boulangeries et même restaurants. La France, jusqu’alors derrière ses homologues allemands ou italiens en termes de consommation et de production est en passe de refaire son retard, faisant par la même occasion de la Picardie la première région productrice de “sans gluten” de l’Hexagone.

Innover et saisir les opportunités

« Nous avons identifié trois segments différents sur le marché du sans gluten. Le premier concerne les malades cœliaques, le second, les gens qui ne sont pas diagnostiqués mais qui se sentent mieux avec des produits sans gluten, comme les sportifs par exemple. Ces deux segments vont tendre à pérenniser le marché. Le dernier, est un phénomène de mode qui veut que le sans gluten fasse maigrir. Ce qui est faux. Celui-ci s’effondrera rapidement », explique Bruno Pierre, président de Guaranteed Gluten Free (GGF) et créateur du groupe ABCD Nutrition, 2e producteur de produits sans gluten en France qui comptabilise 130 salariés. L’entrepreneur s’est lancé il y a 20 ans sur ce marché avec une première entreprise qui intégrera un grand groupe quelques années plus tard. En 2008, le chef d’entreprise décide de se lancer seul et ouvre à Moreuil (Somme) un premier site de production. Trop à l’étroit, GGF s’installe en 2013 avec le soutien d’Agro-sphère et de la Région, à Roye (Somme) dans un bâtiment de 3 200 m². Une extension de 2 500 m², qui permettra le regroupement des sites de production et comptera une cinquantaine de salariés, est prévue en 2016. Depuis quelques mois, l’entreprise a relocalisé une partie de sa production jusqu’ici réalisée en Pologne. « Le marché du sans gluten s’est accéléré depuis trois ans, ce qui intéresse forcément les grands groupe. La question d’arrêter de grandir ou au contraire de se développer s’est donc posée. Nous avons décidé de continuer notre croissance avec une ouverture de capital », note Bruno Pierre dont la plus grande fierté est de continuer à créer des emplois. ABCD Nutrition, qui compte 150 références distribuées à 80% en France (magasins spécialisés et grandes surfaces) et 20% en Europe, connait un taux de croissance qui oscille autour de 25%.

Une extension du bâtiment de Roye est prévue en 2016.

Une extension du bâtiment de Roye est prévue en 2016.

Le sans gluten ailleurs en Picardie

En dehors de ce réseau industriel, le “sans gluten” a également gagné commerçants et hôteliers de la région. C’est le cas du Clos du Moulin à Vron (80), repris en janvier 2014 par Françoise et Simon Gorrier.

« Nous avons décidé de nous mettre au sans gluten pour répondre à des demandes de plus en plus régulières. Cela ne demande pas d’efforts particuliers, juste une petite organisation en cuisine, mais rien d’insurmontable. Le client fait son choix, et nous adaptons les plats en fonction. Tout est fait maison, il est donc assez simple de réaliser des plats sans gluten à la demande », explique-t-on au premier restaurant picard à proposer ce type de service. À Attichy (Oise), Isabelle et Benoît Amiel, créateurs de la biscuiterie La pierre qui tourne proposent depuis quelques mois une gamme de biscuits naturellement sans gluten. L’Ultra citron, le Cardamiel et le Ricookie ont vu le jour suite à une demande elle aussi de plus en plus pressante. « Avec cette ligne, nous venons de répondre aux demandes récurrentes de nombreux clients désireux de déguster des biscuits adaptés à leurs besoins sans délaisser leur plaisir », explique le couple sur la plate-forme participative Tellement prêt (Initiative Somme) qui a permis en partie de financer ce projet.

L’institut polytechnique LaSalle Beauvais partie prenante du projet ProtAlSafe

ProtAlsafe regroupe cinq partenaires issus de l'industrie et de la recherche.

ProtAlsafe regroupe cinq partenaires issus de l'industrie et de la recherche.

Lancé en 2013, le projet ProtAlSafe a pour objectif de développer des produits sans gluten pour répondre le mieux possible aux besoins nutritionnels des patients cTmliaques, mais aussi l’élaboration de compléments alimentaires permettant d’améliorer leur confort digestif. Labellisé par les pôles de compétitivité IAR et Valorial, sélectionné par le Fonds Unique Interministériel (FUI), le projet, porté par GGF, réunit Biofortis, l’Institut National de la Recherche Agronomique de Nantes, ABCD Nutrition via son laboratoire C-Viatis ainsi que l’Institut Polytechnique LaSalle Beauvais. «  Notre équipe travaille sur les maladies inflammatoires digestives et a la particularité d’être pluridisciplinaire  », explique Carine Delayre-Orthez, enseignant-chercheur au sein de l’école d’ingénieur beauvaisienne. «  Nous réunissons aussi bien des compétences en microbiologie, en physiologie ou en immunologie. Nous savons à la fois travailler sur des cultures cellulaires, mener des études précliniques mais aussi des études cliniques chez l’homme  », ajoute-t-elle. L’équipe de recherche est chargée de tester in vivo l’efficacité des compléments alimentaires qui auront été développés. Une fois cette évaluation faite et l’utilité de ces compléments alimentaires, validée, le laboratoire pourra aider à mener une étude clinique chez l’humain. «  Actuellement, nous sommes en plein dans la partie validation de l’efficacité. Nous avons déjà fait une première étude préliminaire l’année dernière et nous sommes en train de finaliser l’expérimentation in vivo », note Carine Delayre-Orthez.

Une participation à un tel projet représente un double intérêt selon l’enseignant-chercheur. Scientifique tout d’abord, puisque les études menées pour développer ces produits seront soumises à communication à la fois lors de congrès et lors d’articles scientifiques publiés dans des revues à comité de lecture. Une donnée fondamentale pour une équipe de recherche académique. Partenariale ensuite, étant donné que la majorité des étudiants de LaSalle Beauvais se destinent au secteur agroalimentaire. Une collaboration comme celle-ci renforce donc concrètement les ponts entre sciences et industrie.