Sauvegarder l'article
Identifiez vous, pour sauvegarder ce article et le consulter plus tard !

La situation préoccupante du bâtiment en Picardie

Concurrence déloyale étrangère, instabilité économique et manque de visibilité, baisse des carnets de commandes, le secteur du bâtiment souffre, entraînant une perte de 4 000 emplois depuis 2008.

Malgré une conjoncture difficile, le secteur du bâtiment espère une reprise du marché grâce au marché de la rénovation énergétique.
Malgré une conjoncture difficile, le secteur du bâtiment espère une reprise du marché grâce au marché de la rénovation énergétique.

 

Malgré une conjoncture difficile, le secteur du bâtiment espère une reprise du marché grâce au marché de la rénovation énergétique.

Malgré une conjoncture difficile, le secteur du bâtiment espère une reprise du marché grâce au marché de la rénovation énergétique.

Si le volume d’activité reste stable autour des métropoles comme Paris, Nantes ou Toulouse, ce n’est pas le cas de la Picardie, qui ne possède pas de centre aussi attractif. L’activité en berne a donc entrainé une baisse de 3,3% d’emplois salariés dans la région, soit une perte nette de 830 postes au premier trimestre 2013. Les défaillances d’entreprises ont également bondi sur les 4 derniers trimestres, s’établissant à 541 contre 400 sur la même période en 2012. « Le bâtiment est soumis à des cycles, la période a été très favorable entre 2000 et 2009 et à présent nous sommes au creux de la vague. C’est peut-être moins visible qu’une entreprise licencie, mais la situation est très compliquée », commente Alain Bethfort, président de la Chambre régionale de métiers et de l’artisanat de Picardie. « Il n’y a pas de signe de relance pour le moment en Picardie. Il va être très difficile de compenser la baisse du volume d’activité, le secteur perdra encore des emplois en 2014 », continue Alain Bethfort.

Dumping social

Si la situation du bâtiment est préoccupante, l’arrivée massive d’entreprises “low cost” venues d’Europe de l’est et du sud est assez mal vécue par les professionnels. La fédération du bâtiment a d’ailleurs lancé une pétition nationale fin octobre contre cette concurrence jugée déloyale. « Faire appel à une entreprise étrangère revient entre 40 et 50% moins cher. La main d’oeuvre venue de l’Europe de l’est coûte entre 8 et 12 euros de l’heure, charges comprises, alors qu’un salarié français c’est 25 euros de l’heure », explique Hubert Callec, président de la fédération du bâtiment de Picardie. Depuis 2007, le recours à des entreprises étrangères prestataires de services installées en Europe est légal en France. Les salariés de l’entreprise sont ainsi “détachés” sur des chantiers à l’étranger. En principe, ces entreprises doivent respecter les règles sociales du pays, notamment en matière de rémunération, ce qui est loin d’être le cas actuellement. Pour Hubert Callec, les symboles sociaux tombent tant sur la sécurité que sur la formation ou encore sur les heures travaillées. Afin d’enrayer ce dumping social, la Fédération a des demandes bien précises : « Les chefs d’entreprise souhaitent plus de contrôles de ces entreprises qui détachent des salariés, notamment sur le versement des charges sociales. Il y a beaucoup de structures fantômes qui n’existent pas dans les pays d’origine. Nous demandons également plus de contrôles sur les chantiers, même le week-end. » La fédération souhaite également la création d’une “Carte BTP” obligatoire sur tous les chantiers afin d’endiguer le travail non déclaré. Du côté des promoteurs, certains appellent au patriotisme économique : « Nous découvrons que l’Europe n’est pas en harmonie en matière sociale, fiscale ou politique. Il serait temps que nos dirigeants règlent ces problèmes de fonds », commente Hervé Thélu agent et promoteur immobilier. « En attendant, les entreprises doivent prendre leurs responsabilités et faire appel à des compétences locales. Ces savoirfaire sont présents sur l’ensemble des domaines. Il faut également être plus créatif, encourager les entreprises à être solidaires, en répondant par exemple ensemble à des appels d’offres. » Un voeu pieu, dans un secteur où le recours aux salariés low cost atteint même les chantiers du secteur public, à l’image du CHU d’Amiens. On estime en France à 60 000 les salariés détachés dans le bâtiment.

TVA & rénovation énergétique

Autre signe d’inquiétude, le manque de stabilité économique et de visibilité qui entraine une certaine paralysie du marché : « C’est pourtant le moment de réaliser les travaux ! Les taux d’emprunt n’ont jamais été aussi bas mais il est très difficile de vendre des travaux aux particuliers. Il faut aujourd’hui 20 ans pour amortir des travaux de mise aux normes, si l’on pouvait le faire sur douze ans, en plus de la TVA à 5,5%, le schéma serait différent », commente Alain Bethfort. La colère des artisans provoquée par le passage à 10% de la TVA à partir du 1er janvier 2014 a été quelque peu atténuée avec l’annonce il y a quelques jours de l’élargissement de la TVA à 5,5% sur les travaux indissociablement liés à la rénovation énergétique qui viennent s’ajouter aux nombreuses aides comme l’éco-prêt à taux zéro ou le crédit d’impôt développement durable. La Picardie compte 700 000 logements, dont 70% construits avant 1970, le coeur de cible des travaux de rénovation énergétique. Les professionnels, espèrent donc une reprise du marché : « Les travaux d’économie d’énergie sont un marché très attendu, même s’ils ne compenseront pas l’ensemble des pertes, ça représente quand même des chantiers à plusieurs millier d’euros », souligne Hubert Callec.