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Le financement participatif, alternative ou complément aux offres bancaires ?

Trente-huit plates-formes de prêt participatif sont aujourd’hui actives en France.
Trente-huit plates-formes de prêt participatif sont aujourd’hui actives en France.

Trente-huit plates-formes de prêt participatif sont aujourd’hui actives en France.

Trente millions d’euros de prêts rémunérés, pour les entreprises, ont transité par des plateformes de financement participatif, platesformes un an et demi. Les acteurs de ce secteur encore embryonnaire entendent se développer dans une logique de complémentarité avec le financement bancaire.

C’est un secteur très jeune, mais qui promet de peser de plus en plus lourd. « Aujourd’hui, 38 plates-formes de prêt participatif sont actives », précise Nicolas Lesur, président de Financement Participatif France, qui regroupe l’ensemble des platesformes qui proposent ce type de financements, sous forme de prêts, de dons ou de souscriptions de titres. C’était le 29 mars, à Bercy, lors des 3es Assises de la finance participative, au cours desquelles les intervenants ont fait le point sur l’état des lieux du secteur. Concernant l’activité des prêts rémunérés aux entreprises uniquement, ce sont donc une trentaine de millions d’euros qui sont déjà passés par ces plateformes. Des sommes qui ont servi à financer quelque 500 projets, portés essentiellement par de petites entreprises. Spécificité du modèle : le taux d’intérêt se situe entre 5 et 10%, mais ces prêts n’impliquent pas de garantie de financement. Quant aux projets financés, il s’agit souvent d’investissements immatériels : répondre à un besoin en fonds de roulement, financer un stock, des travaux…, énumère Nicolas Lesur. « Ce sont des investissements qui ne peuvent pas faire l’objet d’une prise de garantie, et qui sont donc plus difficiles pour les banques. (…) Le financement participatif a un peu ouvert le champ de financements mal appréhendés par le système financier traditionnel », analyse le président de l’association. En France, c’est donc un acteur de type nouveau dans le financement des entreprises qui s’implante, et son activité est légalement encadrée. Car ces plates-formes doivent avoir le statut « d’intermédiaire en financement participatif », créé par l’ordonnance du 30 mai 2014, et être immatriculées au Registre unique des intermédiaires en assurance, banque et finance géré par l’Orias. Par ailleurs, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), déjà chargée de l’encadrement des autres intermédiaires financiers, surveille leur activité. « Ici, le cadre est innovant car sur une même opération, il faut protéger le prêteur et l’emprunteur (…). Il faut que cela reste simple, car on ne parle pas avec des professionnels (…). Nous sommes passés d’un financement auprès de la communauté proche, à un financement auprès de la communauté éloignée. La confiance est placée dans l’intermédiaire, qui doit informer les prêteurs et les financeurs de ses critères. Nous veillons à ce que la communication soit équilibrée, et que le prêteur perçoive bien le risque qu’il prend », précise Maryvonne Mary, chef de service du contrôle des intermédiaires à l’ACPR.

Prêt visible et sans garanties Côté emprunteurs, le financement participatif constitue une possible ressource, mais qui a ses spécificités. « Le développement du crowdfunding est utile. C’est un process qui donne de la visibilité. Au-delà de l’aspect financier, il est important de faire partager son projet à une communauté », avance JeanLouis Bancel, président du Crédit Coopératif, établissement bancaire très investi dans le financement participatif. Par ailleurs, les financements bancaires et participatifs ne répondent pas aux mêmes besoins, ajoute Hervé Hatt, président de meilleurtaux.com. S’adressant à l’origine aux particuliers, le site a lancé cette année une offre pour les professionnels qui recherchent un financement, les dirigeant vers la solution adéquate. Parmi les demandes de financement exploitables déposées sur le site, « un tiers relève du crowdfunding. Les autres, comme un achat de fonds de commerce, relèvent du financement bancaire », constate Hervé Hatt. Pour lui, le taux d’intérêt beaucoup plus élevé du crowdfunding (entre 5 et 10% contre moins de 2% pour les banques), ne constitue pas nécessairement un enjeu. « Rapporté à la taille du projet et en nombre d’euros par mois, ce n’est pas forcément significatif. Dans beaucoup de cas, le taux d’intérêt n’est pas clivant. C’est la nature du projet qui fait la différence », insiste Hervé Hatt. En fait, les deux financements seraient complémentaires.
Un destin commun ? « En général, les entreprises [ndlr, qui ont recours au financement participatif] sont toutes financées par les banques. Cela vient compléter », témoigne Nicolas Lesur. Avis partagé par Fabrice Pesin, Médiateur national du crédit aux entreprises, qui, dans ce cadre, s’emploie à faire connaître le financement participatif. Pour autant, la démarche est loin d’être évidente. « Pour l’entreprise, c’est un vrai défi : elle doit s’approprier ces nouvelles règles, et ne pas avoir peur de combiner ces différentes sources de financement. De plus, il faut que celles-ci sachent travailler ensemble », analyse Fabrice Pesin. Par ailleurs, au delà des différences en termes de projets financés, ces deux acteurs du financement ont peut être des rôles différents à jouer. « Pour les banques, il y a beaucoup de choses à faire. (…) Elles peuvent conseiller leurs clients professionnels et les accompagner vers le crowdfunding dans le cadre d’une relation de conseil, de la même manière qu’elles accompagnent une ETI sur le marché obligataire », avance le président de Financement participatif France. Reste à savoir quel sera l’avenir de ce nouveau type de financement, aujourd’hui quantitativement très limité. « Il faut faire de la pédagogie pour que les entreprises s’approprient ces nouvelles formes », insiste Fabrice Pesin. « Le secteur évolue bien. Aujourd’hui, tous [ndlr, les acteurs du monde financier] essaient d’avoir des partenariats avec des plateformes de crowdfunding. Et nous avons un cadre qui essaie de garantir la confiance (…) En revanche, le contexte financier va amener à poser des problèmes de business modèle. Ces plates-formes ont des investisseurs, donc, elles doivent tenir sur la durée. On va arriver dans une période de faux plat », prévient JeanLouis Bancel.