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Le Medef veut aller plus loin sur l'épargne salariale

Les mesures visant à favoriser l'épargne salariale dans la loi Macron sont trop timides, d'après les intervenants d'une table ronde organisée par le Medef. En particulier, le forfait social, dont les taux ont pourtant été rabaissés, fait débat.

Pour Charles Locquet, l’épargne salariale constitue un outil de management avantageux pour le dirigeant et les salariés.
Pour Charles Locquet, l’épargne salariale constitue un outil de management avantageux pour le dirigeant et les salariés.

Sur le plan des principes, favoriser le déploiement de l’épargne salariale, c’est « rompre le clivage qui est trop souvent fait entre salariat et capital », Emmanuel Macron, ministre de l’Économie.

À l’heure où la loi Nouvelles opportunités économiques (Noé), est en gestation, le Medef fait entendre les positions du monde économique sur les mesures déjà prises par le gouvernement en matière d’épargne salariale. “Épargne salariale: l’après loi Macron, l’heure du bilan et de l’action”, ainsi s’intitulait la table ronde organisée par le syndicat patronal, le 1er décembre, à Paris. Intervenant via une vidéo enregistrée, le ministre de l’Économie, Emmanuel Macron, a rappelé les principaux objectifs et mesures déjà prises concernant l’épargne salariale, dans le cadre de la loi dite Macron, adoptée en juillet dernier. Sur le plan des principes, favoriser le déploiement de l’épargne salariale, c’est « rompre le clivage qui est trop souvent fait entre salariat et capital », démarre Emmanuel Macron. Plus pratiquement, l’objectif consiste à « aider à financer notre économie , nos entreprises », et plus particulièrement les PME, poursuit le m i n i s t r e , pour qui ces dispositifs permettent aux entreprises de disposer d’un financement de long terme. Les salariés aussi devraient y trouver leur compte : les nouveaux textes prévoient notamment que, par défaut, les salariés aient accès à un système de gestion pilotée de leur épargne. Ce dernier leur permettrait une prise de risque graduée, de plus en plus faible au fur-et-à-mesure qu’ils se rapprochent de la retraite. Dans le train de mesures prévues par la loi, et rappelées par Emmanuel Macron, une en particulier suscite de nombreux débats et attentes supplémentaires : il s’agit de la réduction du forfait social, la contribution versée par l’employeur sur les sommes versées au titre de l’intéressement, de la participation, et de ses abondements aux diverses formes de plan d’épargne salariale. Son taux passe de 20% à 16% pour les plans d’épargne dirigés vers le financement des PME et ETI. Quant aux entreprises de moins de 50 salariés qui mettent sur place pour la première fois un dispositif d’épargne salariale, elles bénéficient d’un taux réduit de 8%, pendant une période de six années. Un taux d’imposition « incitatif », argumente Emmanuel Macron, dans sa vidéo.

Le forfait social, « un impôt qu’il faut supprimer »

Son avis est loin d’être partagé par tous les intervenants à la table ronde du Medef, dont les critiques portent avant tout sur ce point. « Je suis assez dubitatif sur le caractère incitatif du forfait social », réagit par exemple Gérard Kesztenbaum, avocat au Barreau de Paris, co-auteur du livre, Épargne salariale : dispositifs et pratiques (Éditions Lamy). L’avocat souligne, notamment, la complexité résiduelle de la mise en oeuvre du dispositif, avec la nécessité pour les entreprises, de jongler avec différents taux.

Autre son de cloche, « le forfait social est un impôt qu’il faut supprimer. Il n’y a pas d’autre taux intelligent que zéro », avance, pour sa part, Michel Bon, président de Fondact, association dédiée à la promotion de la participation des salariés dans les entreprises et les organisations. Pour lui, avec la loi Macron, la modification de la fiscalité a été « très timide ».

Et pour favoriser l’épargne salariale dans les PME, Michel Bon préconise plutôt l’adoption d’une solution différente, « une sorte de livret de caisse d’épargne pour le salarié. C’est important, car c’est dans les PME que le salarié peut le plus facilement constater le lien entre ce qu’il fait et les résultats de l’entreprise », ajoute-t-il. Marc Veyron, directeur des ressources humaines de Capgemini, président du groupe de travail épargne salariale du Medef et du Copiesas, l’instance de réflexion sur l’épargne salariale et l’actionnariat salarié, qui a nourri les travaux de la loi Macron, se veut plus positif : « Il faut passer à l’action. Je compte beaucoup sur le fait que les branches professionnelles se saisissent du sujet (…). C’est souvent plus facile à faire dans l’entreprise, mais la branche professionnelle peut donner une impulsion. » Quant à Bernadette Laclais, députée de Savoie, elle rappelle que, concernant le forfait social, « on ne peut pas passer du jour au lendemain de 20 à zéro ». Plus généralement, « cette loi a eu un effet de déblocage sur un certain nombre de situations (…) nous sommes conscients qu’on aurait pu aller plus loin », admet la députée, rappelant que le législateur doit aussi tenir compte du déficit et des possibles « effets de bord », des mesures qui sont prises.

L’épargne salariale pèse 15 milliards d’euros

En 2014, sur les quelque 15 millions de salariés que compte la France, 9 millions sont couverts par au moins un dispositif d’épargne salariale, d’après les enquêtes réalisées régulièrement par la Direction de l’animation de la recherche des études et des statistiques (Dares), du ministère du Travail. Et ils sont 7 millions à avoir touché une prime, expose Françoise Bouygard, directrice de la Dares. La situation est très différente en fonction du type d’entreprise et des secteurs. En particulier, on note une « nette césure » entre les entreprises qui comptent moins de 50 salariés, et les entreprises de grande et moyenne taille ont beaucoup plus recours à l’épargne salariale que les plus petites, rappelle Françoise Bouygard. Par secteur, dans l’industrie, comme la fabrication de matériel ou le transport, le recours à l’épargne salariale est quasiment la norme, dans d’autres secteurs, comme la restauration, la santé, ou encore l’action sociale, il ne dépasse pas les 30%. Au total, en 2014, 15 milliards d’euros ont été distribués auprès de 6,7 millions de salariés. Ces derniers ont reçu en moyenne 2 270 euros. Par ailleurs, la Dares constate que les branches professionnelles connaissent un « faible dynamisme » des négociations sur le sujet, qui est plutôt traité au niveau des entreprises.

« Nous avons essayé au maximum de simplifier, d’encourager (…). Notre économie a besoin d’investissements. La loi donne des outils, mais ils ne servent à rien si les acteurs économiques ne s’en saisissent pas », conclut Emmanuel Macron, dans son intervention vidéo.

Pour Charles Locquet, l’épargne salariale constitue un outil de management avantageux pour le dirigeant et les salariés.

Pour Charles Locquet, l’épargne salariale constitue un outil de management avantageux pour le dirigeant et les salariés.

« Fiscalement, l’épargne salariale est intéressante »

Pour le patron de la CGPME Oise Charles Loquet, qui dirige l’agence beauvaisienne Idée claire communication, ces mesures sont «  une bonne nouvelle, cette diminution du taux de l’épargne salariale va booster un outil qui était déjà avantageux  ». Une baisse qui, estime le président du syndicat patronal, va encourager le recours à l’épargne salariale, dont bénéficient les salariés  de son entreprise depuis deux ans déjà : «  C’est un bon dispositif pour les salariés qui adhèrent à un système relativement protégé avec un risque moindre, mais également pour les dirigeants. Fiscalement, l’épargne salariale est intéressante pour les deux parties, à plusieurs titres, elle permet notamment une exonération des charges sociales salariales par rapport à la partie abondée. Il s’agit aussi de montrer la satisfaction du chef d’entreprise envers ses salariés, et de renforcer leur motivation, assure Charles Locquet. Il ne faut pas l’envisager comme une contrainte, mais comme un investissement qui bénéficie à l’ensemble de l’entreprise. Le dispositif est de plus assez souple, avec par exemple une sortie du capital anticipable à hauteur de 20%. Il faut le démocratiser et l’appréhender comme un outil supplémentaire de management. »