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La loi de finances 2015 bouscule les CCI

Déjà mises à mal en 2014 avec un prélèvement exceptionnel et une première baisse de recette fiscale, les chambres de commerce et d’industrie voient leur budget fortement amputé avec la loi de finance 2015 discuté et voté mi-octobre à l’Assemblée.

En 2015, les chambres picardes bénéficieront d’un budget global de 22 millions d’euros.
En 2015, les chambres picardes bénéficieront d’un budget global de 22 millions d’euros.
L’Assemblée Nationale a légèrement adouci les coupes budgétaires à destination des CCI malgré l’opposition du gouvernement.

L’Assemblée Nationale a légèrement adouci les coupes budgétaires à destination des CCI malgré l’opposition du gouvernement.

En 2014 le gouvernement dirigé par Jean-Marc Ayrault avait décidé d’instaurer une ponction “exceptionnelle” de 170 millions d’euros dans les ressources des chambres de commerce et d’industrie. À cela était venu s’ajouter une baisse de 15 % des ressources fiscales liées au Pacte de confiance. Des opérations qui avaient alors suscité une première vague de questions au sein des chambres consulaires. Ces interrogations se sont aujourd’hui transformées en grande inquiétude puisque la loi de finance 2015, qui a pour objectif 21 milliards d’économies, s’en prend une nouvelle fois au budget des CCI. La loi prévoit de retirer 500 millions d’euros de leurs fonds d’investissement mais également de réduire leurs ressources fiscales de 200 millions l’an prochain, soit une baisse de 17 %. Une réduction qui est amenée à se poursuivre en 2016 (-27 %) et en 2017 (-37 %), soit un milliard sur trois ans. Le député PS de Côte d’Or, Laurent Grandguillaume, craignant la fermeture de places en CFA, des défauts de gestion de certains ports, aéroports ou zones d’activités mais aussi la perte de 7 000 emplois sur les 26 000 engendrés par les chambres consulaires, a choisi de déposer un amendement pour lisser l’effort des CCI. « Il ne s’agit pas d’exonérer les CCI de l’effort budgétaire national. Il s’agit pour moi de défendre un rythme de baisse de dépenses qui soit compatible avec les investissements locaux sur le plan économique », a-t-il déclaré sur son site Internet. Le député PRG Joël Giraud a lui aussi déposé une proposition similaire. Rejeté en commission des finances, l’amendement prévoyant de réduire la baisse de ressources fiscales de 200 à 69 millions d’euros en 2015 a été adopté en première lecture par l’Assemblée Nationale. Mais le gouvernement a, chose rare, demandé une seconde délibération. Et dans la nuit du 20 au 21 octobre, à 3 heures du matin, l’amendement voté a finalement été rejeté. Les CCI verront donc bien leurs ressources fiscales baisser de 200 millions d’euros l’an prochain.

Impact pour la Picardie

« Le gouvernement a, depuis l’année dernière, décidé de reprendre de l’argent aux chambres de commerce pour le redonner en partie aux entreprises. Jusque-là nous n’avons pas contesté. Mais cette nouvelle ponction de 500 millions est très différente et aura de graves conséquences. En Picardie par exemple, cela provoquera une baisse de 25 millions d’euros sur l’ensemble des chambres », s’alarme Jacky Lebrun, président de la chambre de Commerce et d’industrie Picardie. Des économies qui toucheront l’ensemble des structures avec des budgets amputés de 9,3 millions dans l’Oise 6,5 millions dans l’Aisne, 5,3 millions pour la CCIR et 4, 3 millions pour le Littoral normand-picard, soit une diminution globale de 37 %. « Nous sommes totalement bloqués, pour la première fois je vais être obligé de sortir un plan déficitaire. Cela va se traduire par l’arrêt net de certains investissements. Ce sont des ports qui sont en train de se développer sur l’Oise, un CFA dans l’Aisne, l’aménagement de la digue au Tréport ou encore la réfection de l’hôtel Bouctot-Vagniez », ajoute-t-il. Si le président de la CCIR est bien conscient et accepte l’idée que les chambres consulaires doivent elles aussi participer à l’effort national, il remet cependant en question la proportion de celui-ci, qui selon lui remet directement en cause le développement des territoires. « Nos dirigeants vont s’apercevoir que toutes les chambres vont présenter de réels déficits en 2015 », professe-t-il d’ailleurs. Des déficits qui entraineront nécessairement un changement de gestion. En Picardie, si le maintien et la préservation des 370 salariés des différentes chambres sont une une priorité, le recours plus fréquent à des mutualisations de moyens entre les structures devrait être mis en place et des rapprochements entre CCI potentiellement envisagés. Même si là encore, les projets du gouvernement bloquent les initiatives dans ce sens sur le long terme. « Nous sommes victimes de la régionalisation puisqu’il est prévu que la Picardie fusionne avec le Nord – Pas-de-Calais, mais on parle aussi de la possibilité pour des départements d’être rattachés à une autre région. Si demain l’Oise envisage d’aller vers l’Île-de-France, que de l’autre côté l’Aisne choisit la Champagne-Ardenne, on fera exploser la Picardie, et notre réseau avec », commente Jacky Lebrun.

Maintenir la proximité

En 2015, les chambres picardes bénéficieront d’un budget global de 22 millions d’euros.

En 2015, les chambres picardes bénéficieront d’un budget global de 22 millions d’euros.

Malgré ces coupes drastiques, Jacky Lebrun affirme que tout sera fait pour maintenir le lien de proximité qu’entretiennent les CCI avec les acteurs économiques locaux, rappelant au passage que les chambres consulaires ont à leurs actifs de belles initiatives. « En Picardie, les ports, les aéroports, ce sont bien les chambres qui les ont initiés, même si c’est devenu une propriété des collectivités locales. Nous avons participé à de grands projets à l’international, nous gérons de grandes écoles et il y aussi un CFA pour chaque département. Si demain, nous n’avons plus les moyens de nous investir dans ces domaines, ce sera très inquiétant », souligne le président qui rejette également cette course à l’économie, improductive voire contreproductive selon lui : « J’ai toujours été sceptique sur les économies dont on parle. Nous cherchons déjà là où on peut baisser les coûts mais il ne faut pas que l’on tue notre réseau et que l’on ne puisse plus apporter un service aux entreprises. » Les chambres des métiers et d’agricultures regardent avec anxiété les dispositifs mis en place par le gouvernement, car si aujourd’hui ce sont les CCI qui en font les frais, elles aussi risquent à terme d’être victimes de ce “hold-up” budgétaire